Chaque année, le Projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) introduit de nouvelles contraintes qui concernent à la fois les médecins et les patients.
Le PLFSS 2026 s’inscrit dans cette continuité et accentue une pression déjà forte sur l’accès aux soins.
Un déclassement tarifaire de certaines spécialités médicales
En 2025, les pédiatres et les gynécologues ont été déclassés sur le plan du remboursement par l’Assurance maladie.
La Sécurité sociale a supprimé la cotation « S » (spécialiste) de leurs consultations pour les reclasser en « C ».
Concrètement, une consultation chez un pédiatre ou un gynécologue est aujourd’hui moins bien remboursée qu’une consultation chez un médecin généraliste, cotée « G ».
Cette décision ne remet pas en cause notre formation ni notre qualification — après quatre années de spécialisation, nous restons des spécialistes — mais elle dévalorise financièrement la médecine spécialisée et permet une diminution du remboursement pour les patients.
Une remise en cause progressive de la liberté d’installation et d’exercice
Le PLFSS 2026 et les orientations gouvernementales associées prévoient ou envisagent plusieurs mesures préoccupantes.
🔹 Médecins retraités
La réforme du cumul emploi–retraite rend l’exercice médical après la retraite nettement moins incitatif, sans permettre l’acquisition de nouveaux droits.
Conséquence probable : une part importante des médecins retraités cessera définitivement d’exercer, entraînant :
- une aggravation des déserts médicaux
- une augmentation des difficultés d’accès aux soins
🔹 Médecins remplaçants
Le projet vise à limiter la durée du remplacement dans le temps (environ deux ans), afin d’inciter à l’installation.
Conséquences concrètes :
- difficulté accrue à trouver des remplaçants
- réduction des jours de présence médicale dans les cabinets
- orientation de certains jeunes médecins vers le salariat
- aggravation des difficultés d’accès aux soins
🔹 Secteur II
Le texte et les débats actuels visent à restreindre fortement, voire empêcher, l’installation de nouveaux médecins en secteur II.
Le secteur II concerne des médecins ayant exercé comme chef de clinique ou assistant hospitalier pendant au moins deux ans.
Il permet, dans un cadre encadré, une liberté tarifaire partielle justifiée par cette expérience.
Empêcher l’installation en secteur II revient à :
- réduire l’attractivité de la médecine libérale
- freiner les nouvelles installations
- accentuer les tensions sur l’accès aux soins
Une pression économique et budgétaire accrue sur les médecins
📉 Un cadre budgétaire contraint
En 2026, l’enveloppe budgétaire allouée à la médecine libérale progresse d’environ +0,9 %, un taux inférieur à l’inflation et à l’augmentation des coûts de fonctionnement.
Alors même que :
- le nombre de patients augmente
- les besoins médicaux augmentent
- les charges explosent
Ce que prévoit ou permet le texte
- encadrement renforcé des dépassements d’honoraires
- impossibilité d’augmenter les tarifs
- augmentation des charges appliquées aux dépassements
- hausse de la fiscalité avec la suppression de certains abattements professionnels pour les médecins n’exerçant pas en zones sous-dotées
→ impact financier pouvant atteindre plusieurs milliers d’euros par an
Or, les coûts de fonctionnement d’un cabinet sont incompressibles :
- loyer ou crédit du cabinet
- salaires (secrétariat, assistants médicaux)
- logiciels, télétransmission, DMP
- matériel médical et consommables
- énergie, assurances, entretien
- charges sociales et fiscales
Un malaise médical massif
Selon un sondage réalisé auprès de 1 900 jeunes médecins :
- 28 % envisagent de se déconventionner
- 25 % envisagent de quitter la profession
- beaucoup envisagent de réduire leur activité, changer de mode d’exercice ou se salarier
- environ 40 % déclarent stress, épuisement ou perte de sens
La réponse du gouvernement face au risque de déconventionnement
Parmi les pistes évoquées : la fin du remboursement des prescriptions réalisées par des médecins déconventionnés (secteur III)
Conséquences pour les patients :
- reste à charge total sur examens, traitements et imagerie
- médecine à deux vitesses
- diminution du nombre de médecins financièrement accessibles
Une nouvelle contrainte administrative : le dossier médical partagé (DMP)
Le projet renforce :
- l’obligation de consulter le DMP avant certains actes
- l’obligation de l’alimenter
Des sanctions ou amendes sont possibles en cas de non-respect des obligations liées au DMP.
Or, dans sa forme actuelle, le DMP est jugé par de nombreux médecins :
- peu ergonomique
- chronophage
- difficilement exploitable
Conséquence directe :
👉 plus de temps administratif
👉 moins de temps médical pour les patients

